C’est un fait, la recherche en ligne se fait de plus en plus sociale. Partie 2.

Partager sa veille en ligne, oui… mais en privilégiant « l’opt in »

Ils sont de plus en plus nombreux les moteurs de recherche qui intègrent désormais les plébiscites de vos amis dans le référencement des sites pour leurs pages de résultats. C’est une démarche dont tiennent de plus en plus compte les développeurs de sites qui incrustent dans leurs pages les outils sociaux de partage. Mais c’est également une démarche collaborative que l’internaute peut mettre en œuvre en dotant son navigateur des applications complémentaires nécessaires.

Connaissez-vous les machines de guerre de la recherche en ligne ? Quand on pose la question en formation -mais j’imagine que ce serait le même en entreprise, dans les ministères, dans les maisons de repos, etc.- la réponse fuse : Google. Certes ! Un grand nombre d’internautes l’utilise, à tel point que l’on n’est pas loin d’un monopole. Monopole qu’instrumentaliserait d’ailleurs le géant américain de la recherche par une politique draconienne d’exclusivité en matière d’insertion publicitaire. Mais disons-le : il n’y a pas que Google. Yahoo est son concurrent de la première heure [1]. Annuaire des débuts de l’internet grand public, il a dû revoir sa technologie pour assurer un aussi bon service que son homologue de Mountain View.

Le duo des pionniers est pris en chasse, depuis de longues années déjà, par une meute de plus petits opérateurs, lesquels assurent parfois la concurrence en se situant dans une niche thématique : moteurs de recherche spécialisés en médias d’info [2], en questions scientifiques et médicales [3], en justice [4], en net-profiling [5]…. Des regroupements se font aussi fréquemment [6], pour augmenter la capacité de concurrence. Ceux qui voudraient être tenu informés de l’évolution de ce marché trouveront sur le site Abondance.com d’Olivier Andrieu de quoi satisfaire leur curiosité.

Chercher le bon moteur

Parmi les ténors de la localisation d’infos, on retrouve bien sûr aussi des grands groupes de l’équipement informatique. Ainsi citons, entre autres, Microsoft (Windows Live) qui, lui aussi, a misé sur le développement d’un moteur de recherche, Bing, pour accrocher une clientèle à laquelle il propose par ailleurs une vaste gamme de produits en ligne. Google, Yahoo, Bing, Altavista, Exalead, Alltheweb, Lycos et bien d’autres… une fameuse armada au service de votre recherche en ligne !

Tous ces outils automatisés travaillent la problématique de la localisation d’infos en constituant des bases de données. Les algorithmes de gestion de celles-ci produisent des pages de résultats en réponse à des requêtes énoncées sous forme de mots-clés libellés dans une syntaxe spécifique. Tout le problème pour l’utilisateur est de savoir sur quels principes de classement ces résultats sont agencés. Pendant une dizaine d’années, au moins, les classements étaient établis sur des critères quantitatifs, les seuls qui puissent réellement faire l’objet d’une programmation informatisée (voir notre analyse précédente).
Depuis l’émergence des réseaux sociaux, la réflexion humaine devant présider à un classement qualitatif est instrumentée par le recours à des instruments de plébiscite : les boutons « J’aime » et tous leurs équivalents.

Ainsi, comme l’annonçait Vincent Hermann, le 17 mai dernier, « Bing se veut plus social et prendra en compte l’avis des amis [7] ». C’est par un « pouce en l’air » que les sites plébiscités par vos contacts seront estampillés dans les pages résultats du moteur de MSN. Ce faisant, il rejoint la tendance déjà amorcée par Google qui pratique de la sorte en compilant les usages des internautes référencés auprès de ses services. Car bien sûr, la technologie sociale de Bing fonctionne exclusivement pour les « clients » MSN, alors que celle de Google est réservée, elle aussi, à sa clientèle. À vous de choisir donc, la communauté au sein de laquelle vous voudrez tirer profit de vos relations sociales en ligne. Mais libre à vous aussi, de vous abonner simultanément à plusieurs services.

Collective IQ

Vous l’aurez compris, d’un simple moteur de recherche, on bascule vers un produit mixte intégrant aussi un moteur de recommandations. En février 2011, seule la version américaine de Google bénéficiait de ces développements technologiques, mais la généralisation ne s’est pas fait attendre longtemps. Fin mai, Florian Karmen évoquait sur son blog les nouveaux services de Google Social Search en français : « Lorsqu’un internaute est connecté avec son compte Google sur le moteur, et que son compte Twitter ou Facebook est lié à ce compte Google, il voit apparaître sous certains résultats des recommandations de son cercle d’amis. Google Social Search ne prend pas seulement Twitter & Facebook en compte mais également les contacts Gmail, les flux RSS de Google Reader, Google Buzz, FriendFeed et Flickr. ».

En fait, à partir du moment où les internautes acceptent de fonctionner sur le web au sein d’une session privée (chez Google ou Bing, par exemple [8] ), et qu’en utilisant des services en ligne, ils créent eux-mêmes les ponts avec d’autres internautes (et à plus fortes raisons si ceux-ci sont aussi clients dudit fournisseur) alors, les algorithmes sont en mesure d’intégrer toutes données produites par vos contacts et les marquer d’un picto dans la liste des résultats. Ce que Google appelle « Collective IQ »… l’intelligence collective.

Partage public

Le bouton Google+1 qui apparaît sur de plus en plus de sites qui réclament votre plébiscite, vous permet de partager publiquement des informations avec le monde entier. Avec le bouton Google+1, vous et les autres internautes pouvez bénéficier de contenus personnalisés fournis par Google et ses partenaires. Lorsque vous attribuez un +1 à un contenu, Google enregistre cette opération, ainsi que des informations relatives à la page à partir de laquelle vous avez cliqué sur le bouton +1. En lieu et place du picto représentant le « pouce en l’air » de Bing, Google associe carrément la photo –plus convaincante sans doute- de votre contact… (à condition, il est vrai que votre contact ait téléchargé une photo sur son profil Google).

Mais il n’y a rien d’étonnant à cela, puisque le système gère en l’occurrence, des infos que les internautes acceptent de rentrer eux-mêmes – naïvement ?- dans la base de données. Certes, il est possible de régler des paramètres pour contenir dans certaines limites, la publicité des actions que vous menez, une fois votre session ouverte. Comme le dit Google, en forme de clin d’œil : « Pas besoin que tout le monde sache que vous cliquez sur le bouton « J’aime » du site de Bob l’éponge. [9] ». Mais c’est à vous de régler ces niveaux de confidentialité car sinon, toute interaction faite dans votre session –dite privée- « peut également apparaître sur d’autres sites Web et dans des annonces sur Internet [10] ». On est loin de surfer en toute confidentialité, si on n’y prend pas garde. Un risque qui est bien réel mais qui n’est pas propre aux sessions sociales… Il est en effet des sites qui instrumentent
–mais est-on encore dans les limites de la légalité ?- vos clics de façon publicitaire, « à l’insu de votre plein gré [11] ».

Intelligence collective ou Big brother ?

Ainsi, le site logé à l’adresse http://www.getawy2.info/ a-t-il incrusté un renvoi en publication sur votre profil Facebook sur chacune de ses vidéos. Un clic curieux de votre part sur une vidéo au titre tapageur (par exemple : Cette fille n’oubliera plus jamais d éteindre sa webcam ! )… et zou, celle-ci se retrouve sur votre mur… au vu et au su de toute votre communauté. Imaginons un instant que l’on généralise cette pratique contestable… Plutôt que d’en référer à l’intelligence collective, c‘est plutôt « Big brother » qu’il faudra évoquer ! Jusqu’où se laisseront faire les internautes ? Sans doute faut-il plutôt réclamer un usage « opt in » (je dois cocher pour marquer mon accord) plutôt que « opt out » (par défaut, on ne demande pas mon avis). En d’autres mots, préférer un système où le partage de ce que l’on destine à son cercle d’amis est mis en œuvre manuellement, et à la pièce.

C’est en ce sens que ce sont développés de nombreux outils complémentaires qui instrumentent le partage de ressources découvertes en ligne. A commencer par les barres de boutons incorporées dans les pages HTML que vous visitez. L’initiative en revient donc au concepteur du site qui espère ainsi que vous ferez connaître sa publication à un plus large public. L’intérêt pour eux, c’est que la promotion que vous faite soit augmentée de la valeur que représente votre crédibilité. On le sait, comme pour un produit de consommation, un site promu par un proche est certainement plus attractif qu’une pub qui vous tomberait sous les yeux, sous forme de bannière publicitaire par exemple. Cette technologie sociale se développe donc largement. Mais tous les créateurs de sites ne sont pas encore au fait de cette incrustation des boutons « J’aime » et autres « Google+1 » sur leurs pages. S’il veut partager ses découvertes, c’est donc à l’internaute surfeur de s’équiper.

Add this

Des barres d’outils pour promotionner, il y en a qui s’installent tels des « plugs in [12] » à votre navigateur. Parmi toutes celles-là, une a notre préférence : le module « Add this » de Firefox. Une petite icône est présente en permanence dans votre barre d’outils Firefox. Quand vous êtes en présence d’une page qui présente un intérêt certain, vous cliquez sur le petit bouton et une gamme de raccourcis vous permet de choisir par quelles voies vous allez communiquer votre trouvaille. Les possibilités vont du simple envoi mail au recours plus sophistiqué d’outils de publications en temps réel, à flux (Rss) tendu. Mais là, nous sommes bien dans le « opt in », la décision volontaire de publier, et non le clic « Partagez… à l’insu de votre plein gré ».

Michel Berhin

Août 2011.

[1Yahoo a été créée en 1994 et Google en 1998

[2Pickanews, spécialisé dans les médias européens

[3Refdoc : la référence en fourniture de documents scientifiques

[4Ejustice pour ce qui concerne le droit français.

[5Citons entre autres Zakta, 123 people, Pipl

[6En 1998, deux ans après sa création Hotbot est racheté par Lycos. En 2002, Yahoo rachète lui même Inktomi pour intégrer une technologie « moteur de recherche » en plus de son annuaire

[8Lesquels vont s’empresser de constituer un historique de vos actions qu’ils vont exploiter (dans les limites de leurs règles de confidentialité. (Lire : http://www.google.fr/intl/fr/privacy/privacy-policy.html) et conserver on-ne-sait pour combien de temps.

[11Selon la formule restée célèbre du cycliste français Richard Virenque.

[12Extension à choisir pour doter votre logiciel de fonctionnalités supplémentaires

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